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Relations avec la hiérarchie et accident du service – CAA Toulouse, 23/04/2024, n° 22TL21099

Une attachée territoriale affectée au service d’une commune avait demandé à son employeur de reconnaître l’imputabilité au service d’un accident survenu le 29 novembre 2018 correspondant à l’annonce faite par son supérieur hiérarchique qu’elle serait amenée à partager le bureau d’une autre collègue avec laquelle il était connu qu’elle n’entretenait pas de bonnes relations.

Le maire a refusé de faire droit à la reconnaissance de l’imputabilité au service de cet événement et l’affaire a été portée devant la cour administrative d’appel de Toulouse. Celle-ci a jugé que le maire n’avait pas commis d’erreur d’appréciation en refusant de reconnaître l’imputabilité au service de l’accident.

La cour de Toulouse a fait une application orthodoxe de la jurisprudence dégagée par le Conseil d’État en 2021 :

« Constitue un accident de service, pour l’application des dispositions précitées, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l’occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci. Sauf à ce qu’il soit établi qu’il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l’exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien, notamment d’évaluation, entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d’être qualifié d’accident de service, quels que soient les effets qu’il a pu produire sur l’agent » (CE, 27/09/2021, n° 440983).

L’idée qui sous-tend cette jurisprudence est de cantonner la reconnaissance d’un accident de service aux seuls cas dans lesquels l’agent est exposé à un véritable risque ; ainsi, en ce qui concerne les entretiens menés entre un supérieur hiérarchique et ses subordonnés, le juge s’attache à conserver une certaine liberté à l’encadrement pour mener ces entretiens et dire les choses aux agents sans risquer d’être tenu pour responsable d’un accident de service à chaque fois qu’une remarque désagréable est formulée.

La qualification d’accident de service requiert la démonstration d’un comportement ou de propos excédant les limites raisonnables d’exercice du pouvoir hiérarchique : insultes, injures, brimades, humiliations….

Ainsi que le relève le rapporteur public près le Conseil d’État, M. Pichon de Vendeuil, « Il faut donc bien, au sens de cette jurisprudence, un événement non seulement soudain mais encore qui dépasse les bornes du simple désagrément, elles-mêmes appréciées de manière objective et non du seul point de vue de l’intéressé ».

La leçon à tirer de cette jurisprudence est de deux ordres : d’une part, il appartient aux managers de demeurer pondérés et mesurés dans leur comportement et leurs propos à l’égard de leurs équipes et, d’autre part, il doit être rappelé aux agents que de simples contrariétés ou remarques désagréables pouvant être émises par un supérieur hiérarchique, même quand elles provoquent chez eux une réaction psychologique difficile, ne constituent pas nécessairement un accident de service.

Frédéric RAIMBAULT

Publié le 16/07/2024